Il était une fois l’Abou Nawas

Si la chaîne Abou Nawas n’existe plus, son esprit est toujours présent, perpétué par les innombrables “ex-Abou Nawas” qui font le tourisme d’aujourd’hui. Exhibé dans les discours ou dans les CV, le nom de l’Abou Nawas fait office de référence quasi académique pour l’hôtellerie en Tunisie. Une grande école qui a vu naître les premiers manuels de procédures, les premiers manuels de formation – que ce soit pour les directeurs d’hôtels ou pour les animateurs –, la première charte graphique et de communication… Une véritable chaîne “à la tunisienne” comme il n’en existe pas jusqu’à aujourd’hui. Pour la mémoire, et un peu par nostalgie, nous sommes allés à la rencontre de quelques-uns de ces “ex” (lire leurs témoignages) et publions quelques photos d’époque.

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L’histoire de l’Abou Nawas est celle d’une coopération arabo-arabe – tuniso-koweitienne en l’occurrence – qui a longtemps fait rêver, avant de se fracasser sur le mur de la politique arabe. Une histoire d’amour qui a fini mal, spécialement pour son plus illustre PDG, Ahmed Al Ibrahim, qui a subi l’expulsion de Tunisie sous la pression des autorités koweitiennes.
Tout commence le 20 octobre 1976. Le Consortium Tuniso-Koweitien de Développement (CTKD) est alors créé avec un capital à majorité koweitienne. Dans la foulée, le CTKD crée l’agence Abou Nawas Travel et la Société Abou Nawas de Gestion Touristique (SOGES), du nom du premier hôtel acquis, l’Abou Nawas Gammarth.
Sous la férule d’Ahmed Al Ibrahim entouré d’Abdelwaheb Soua à l’exploitation, Faouzia Belajouza aux finances et Raouf Ben Amor à l’animation et la communication – et bien d’autres grosses pointures comme Arbi Belkhadi aux Achats, Mokhtar Abid à la Direction Technique,  ou Annick Mahjoub au Marketing – la SOGES s’est retrouvée au fil des investissements et des partenariats avec vingt hôtels (voir ci-dessous). Quelques-uns figurent encore aujourd’hui parmi les meilleures unités du pays, même s’ils portent désormais d’autres enseignes.
L’épopée n’a pas survécu à la Guerre du Golfe. En effet, pour punir l’Etat tunisien de sa position jugée pro-irakienne, l’Etat du Koweit a décrété l’arrêt des investissements en Tunisie. Un ordre qui n’était pas du goût d’Ahmed Al Ibrahim, Koweitien marié à une Tunisienne et Tunisien de cœur, qui est allé jusqu’à s’associer avec des investisseurs saoudiens pour mener à son terme le projet de l’hôtel Le Palace à Gammarth. Un geste qui lui a valu d’être arrêté et expulsé de Tunisie. Ce départ sonnait le glas de la chaîne Abou Nawas, les successeurs d’Ahmed Al Ibrahim, comme Motlak Essanaie, ne pouvant empêcher l’inéluctable fin.

Que reste-t-il de l’Abou Nawas ?
Mais si la chaîne fait désormais partie de l’histoire du tourisme tunisien, son esprit est toujours présent à travers ses ex-cadres. En effet, ces derniers sont partout : à la tête de société de gestion hôtelière, directeurs d’hôtels, directeurs financiers, marketing ou des ressources humaines, cuisiniers ou même jardiniers. On les reconnaît d’abord à leur tenue. Tous, ou presque, sont toujours tirés à quatre épingles, un peu guindés comme s’ils portaient un uniforme. Ils parlent souvent de procédures, et confessent volontiers que « ça devrait fonctionner autrement ». Ces “ex-Abou Nawas” qui font aujourd’hui le bonheur des hôtels tunisiens restent liés par leur ancienne appartenance. Ils agissent parfois comme un réseau informel qui a ses codes et ses solidarités, y compris parmi les plus jeunes. Si un bilan de l’expérience Abou Nawas devait être établi, cet “esprit d’appartenance” figurerait certainement à son actif.

Historgramme-CTKD

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Témoignages

Ils sont assurément de bons témoins pour donner un aperçu de ce qu’ont été le lancement et le développement de la chaîne Abou Nawas. Raouf Ben Amor a été responsable de l’animation puis Directeur de la Communication au sein du CTKD (il est actuellement consultant en évènementiel culturel), et Hédi Métahni et Talha Housseini détiennent le record de longévité comme directeurs généraux à l’Abou Nawas.

Hédi Métahni

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Racontez-nous vos débuts à l’Abou Nawas…

Hédi Métahni
J’ai débuté en 1983, à 26 ans, comme chef Réception à la Résidence Diar El Andalous qui est devenue ensuite Abou Nawas Alhambra. En 1985, je suis nommé directeur d’hébergement à Abou Nawas Hammamet ouvert en mai, et en septembre Abdelwaheb Soua me donne mon titre de DGA. En 1988, je deviens directeur résident à Monastir. Ensuite j’ai occupé le poste de Directeur Général dans divers hôtels dont j’ai finalement cumulé la direction comme le Mechtel, Le Palace, l’Abou Nawas Tunis.

Que retenez-vous de l’Abou Nawas ?

Pour moi, l’Abou Nawas est le résultat de la rencontre d’une volonté politique avec les grands meneurs d’hommes qu’étaient le trio Ahmed Al Ibrahim, Abdelwaheb Soua et Faouzia Belajouza. Il y a eu aussi l’apport de grands techniciens et directeurs généraux d’hôtels dont feus Rachid Ben Amara et Achour Gara, Talha Housseini, Chadli Jaziri [quelques jours après cette interview, on a appris le décès de Chadli Jaziri, toutes nos condoléances à sa famille et ses amis, ndlr], et bien d’autres comme Annick Mahjoub au marketing… ils étaient tous des références dans leur domaine.

Abdelwaheb Soua est souvent cité comme la référence en matière d’exploitation, à quoi doit-il cette réputation ?

Abdelwaheb Soua était un grand technicien doublé d’une forte personnalité. A titre d’exemple, je me rappelle une anecdote avec feue Wassila Bourguiba, avant l’ouverture de l’Abou Nawas Hammamet. Chadli Jaziri devait y être nommé DG et Soua l’avait envoyé pour cela en stage au Sheraton Dubai. Un jour, Wassila Bourguiba vient visiter l’hôtel où je la reçois en tant que Directeur de l’Hébergement. Elle s’enquiert du nom du DG et je lui réponds qu’il s’agit de Chadli Jaziri. Elle me demande : d’où est-il ? Je réponds : du Sud tunisien. Elle s’exclame alors : « Non, non, on va nommer Nounou ici » en parlant de Noureddine Brahim qui était un de ses proches. Là-dessus, j’appelle Abdelwaheb Soua pour lui dire que j’ai à lui parler. Lorsque je lui raconte l’histoire, il me dit carrément : « Qu’elle aille se faire voir ailleurs ». Et c’est le DG prévu par lui qui a été effectivement nommé. Cette rigueur a quasiment disparu après Abdelwaheb Soua.

Qu’avez-vous appris à l’Abou Nawas ?

J’ai tout appris à l’Abou Nawas et auprès d’Abdelwaheb Soua. Dans l’esprit de ce dernier, il y avait des étapes indispensables pour devenir un directeur d’hôtel : il fallait passer par l’hébergement, puis être DGA etc. Et à chaque étape, il y avait les stages de formation adéquats. Par exemple, un directeur qui s’apprêtait à gérer un club devait passer un stage dans un club similaire à l’étranger. J’ai pu profiter de toutes sortes de stages ; il m’a même envoyé en stage de catering chez Sabena.

Votre meilleur souvenir à l’Abou Nawas ?

J’ai laissé quelques résultats record qui n’ont pas été dépassés à ce jour. Il faut dire que la chaîne Abou Nawas était une expérience unique pour un jeune cadre par l’émulation qui y existait. Même si elle n’offrait pas les meilleurs salaires, il y avait de la considération et la chaîne, par son développement, offrait des perspectives de promotion à ses cadres qui étaient inexistantes ailleurs.

Votre plus mauvais souvenir ?

Mon plus mauvais souvenir, c’est quand il a fallu accompagner les policiers à l’hôtel Le Palace pour en faire sortir Ahmed Al Ibrahim. J’en étais malade, mais je devais exécuter les ordres. Ahmed Al Ibrahim était plus tunisien que les Tunisiens. Ses problèmes ont commencé après la Guerre du Golfe et son expulsion était un problème entre Koweitiens. Son départ annonçait la fin de l’Abou Nawas, même si les PDG qui l’ont suivi n’ont pas démérité ; mais il manquait la volonté politique du côté koweitien.

 

Raouf Ben Amor

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Comment êtes-vous arrivé au CTKD ?

Raouf Ben Amor
Le PDG d’alors était Abdellatif El Hamad, et Ahmed Al Ibrahim était DGA. Il y avait à ce moment Sami Ben Khlifa (Marketing), Ridha Ben Zakour (Directeur d’exploitation) et Faouzia Belajouza (DAF) ainsi qu’Adel Boussarsar, Vice-président nommé par l’Etat tunisien.
Je suis arrivé au CTKD par hasard, car j’avais été recruté par Lotfi Belhassine pour m’occuper du festival de Tabarka 1978 : « Ne pas bronzer idiot ». Après, Lotfi Belhassine a eu le projet d’ouvrir un bureau du Club Aquarius à Tunis et m’a nommé représentant. Entre-temps, il était devenu conseiller du CTKD et m’a désigné pour assister à des réunions du Consortium.
Lors d’une visite en Tunisie du Ministre des Finances du Koweit et premier conseiller de l’Emir, j’ai été désigné pour l’accompagner ; une mission supposée difficile au vu du rang et de l’importance du Ministre. Je m’en suis, semble-t-il, bien acquitté puisqu’elle m’a valu les éloges publics dudit ministre. C’est ainsi que, quand le CTKD a eu le projet d’ouvrir un bureau au Koweit, j’étais naturellement désigné pour la mission sous prétexte que « j’avais mis le ministre des Finances dans ma poche » ! Je suis donc parti au Koweit pour ouvrir la première agence Abou Nawas Travel, avec la bénédiction de Lotfi Belhassine que j’ai dû quitter.

Quels étaient vos rapports avec Ahmed Al Ibrahim ?

Quand nous nous sommes connus, il était encore DGA. Comme il était fan des arts et des artistes, c’est tout naturellement que nous nous sommes rapprochés l’un de l’autre et que je l’ai introduit dans le milieu du théâtre à Tunis. De cette affinité est né plus tard, en 1986, l’espace El Teatro au complexe El Mechtel. A ce moment-là, la loi imposait de construire une salle de cinéma dans chaque nouveau complexe. Au Mechtel, il y en avait deux que personne n’a voulu louer. J’ai convaincu Ahmed Al Ibrahim, devenu PDG, d’en faire un espace de création et un théâtre. Donc je peux dire que la rencontre d’Ahmed Al Ibrahim a été déterminante dans ma carrière au CTKD ; j’ai quitté celui-ci deux semaines après le départ d’Al Ibrahim.

Justement, parlons de cette carrière. Vous avez été à l’animation et je vous ai connu directeur de la Communication…

J’ai passé environ une dizaine d’années à m’occuper de l’animation. A mon retour du Koweit, feu Abdelwaheb Soua m’a demandé d’établir un manuel pour l’animation. Pour cela, j’ai demandé et obtenu un stage au Méridien de Dakar (grâce à une recommandation de Lydie Trigano, fille du propriétaire du Club Med), où s’expérimentait à ce moment-là un nouveau concept d’animation pour les hôtels de ville. Leur équipe d’animation comptait une cinquantaine de membres et toutes sortes d’activités étaient programmées, à commencer par la pêche à l’aube et jusqu’au concert le soir. Et c’est là que j’ai dû mettre au point un manuel avec des programmes d’animation pour les clubs mais aussi pour les hôtels. Il y avait des sketchs issus du patrimoine culturel tunisien. Les animateurs accomplissaient un stage de six mois au Théâtre National – des stages dirigés par Mohamed Driss – suivi par des cycles de perfectionnement, et bénéficiant du soutien de responsables comme Hédi Métahni et Néjib El Abed. On a fini par un concours national des animateurs qui clôturait l’année. C’était en 1985 et on savait déjà que le soleil et la mer n’étaient plus suffisants pour séduire les clients.
En 1992, au moment où Ahmed Al Ibrahim est allé passer son service militaire, Serge Adda est venu me chercher pour le rejoindre à TV5 où je suis parti comme détaché du CTKD. A son retour, Ahmed Al Ibrahim a exigé que je revienne, et pour cela j’ai demandé le poste de Directeur de la Communication.

Qu’avez-vous retenu de l’Abou Nawas ?

Je retiens une certaine fierté d’avoir participé à une belle aventure humaine. Certains des animateurs que j’ai supervisés sont actuellement des directeurs généraux d’hôtels en Espagne et ailleurs. Fierté aussi quand je me balade dans la rue et que des gens m’interpellent pour me dire : « A quand un nouveau Jazz Club ? » ; ce club que j’avais lancé à Gammarth accueillait les plus grandes stars du jazz. Côté organisationnel, j’appréciais l’existence d’une politique et de budgets dédiés, que ce soit à l’animation ou à la communication.

 

Talha Housseini

Entré en 1983 à l’Abou Nawas – en tant directeur résident du Diar El Andalous – Talha Housseini a été un des derniers à en sortir, en 1997, année où il a dû quitter son hôtel préféré, l’Abou Nawas Gammarth. Aujourd’hui Directeur Général de l’Hasdrubal Hammamet, il s’apprête à prendre sa retraite le 31 décembre prochain.

Talha-Housseini

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Que retenez-vous de l’Abou Nawas ?

Talha Housseini
La pointure de ses dirigeants comme Abdelwaheb Soua, Ridha Ben Zakkour, Faouzia Belajouza, Ahmed Al Ibrahim. Cette chaîne se distinguait par son sérieux dans la gestion, la qualité de ses services et sa culture d’entreprise qui est à l’image de l’Hasdrubal maintenant. A l’Abou Nawas, on engageait les meilleurs directeurs d’hôtels, qui ensuite se perfectionnaient au sein de la chaîne et amélioraient chaque jour le rendement de leurs unités.

Qu’y avait-il de mauvais au sein de l’Abou Nawas ?

Honnêtement, je ne retiens rien de mauvais jusqu’à l’année 1991 et le début la Guerre du Golfe.

Et votre meilleur souvenir ?

C’est incontestablement mon passage à l’Abou Nawas Gammarth, où j’ai connu beaucoup de gens de tous les domaines. Je trouve dommage que cet hôtel soit maintenant quelque peu dénaturé : la piscine Le Saf-Saf ne s’appelle plus ainsi, les apparthôtels ont été rasés et on parle de la création d’un parking aérien… Je suis peut-être nostalgique, mais je trouve que c’est une partie de l’âme de cet hôtel qui s’en va.

 

Propos recueillis par Lotfi Mansour

Hommage
Achour Gara : un directeur de la caste des grands

Achour-Gara

Il fait certainement partie des grands de l’hôtellerie, de ces premiers directeurs formés à l’étranger, et qui ont dû prendre en main la destinée des premiers “grands hôtels” tunisiens pour y introduire les procédés et méthodes appris ailleurs. Achour Gara est décédé au début des années 2000, au sommet d’une carrière bien remplie que sa femme, aujourd’hui professeur d’économie à Nabeul, a bien voulu retracer pour nous.
Après des études de tourisme à Strasbourg dans les années 60, Achour Gara débute sa carrière à Londres dans un hôtel indépendant. Puis il est recruté au début des années 70 par Sheraton qui le nomme en Belgique avant de l’envoyer en Amérique Latine. Au début des années 80, il est nommé Directeur Général à l’Abou Nawas Diar El Andalous, avant d’être recruté par la chaîne Intercontinental pour diriger un hôtel en Arabie Saoudite. Revenu en Tunisie quelques années plus tard, il réintègre la chaîne Abou Nawas, au Mechtel d’abord, à Hammamet ensuite. C’est en 1994 qu’il prend en main l’Abou Nawas Tunis, hôtel qu’il a marqué de son empreinte avant de commencer sa lutte contre la maladie. Il finira sa carrière et sa vie à l’Abou Nawas Africana de Hammamet.
Fut-il un hôtelier heureux ? « Oui, notamment par les éloges qui lui parvenaient sur la bonne marche des hôtels qu’il dirigeait comme Tunis ou Hammamet », répond sa femme. Toutefois, elle ajoute qu’il a été déçu par le traitement que sa chaîne lui a réservé à la fin. Mais il est vrai qu’à ce moment-là, la chaîne n’était déjà plus que l’ombre de ce qu’elle fut.




Au sommaire du magazine Le Tourisme n°18

Retrouvez dans Le Tourisme n°18 du 1er juillet 2013 :

– un dossier souvenir  : « Il était une fois l’Abou Nawas », avec des témoignages de Hédi Metahni, Raouf Ben Amor…

– un entretien avec Jamel Khubbiz, Directeur Général de Laico Management qui annonce les nouvelles ambitions de sa société

– un parcours à suivre : Vendôme Management, société de gestion hôtelière et d’assistance technique

– et Le Mag  : « Djerba, l’amitié en partage »




Acharnement

Le calvaire de Habib Ben Slama, ex-directeur de Tunisair Paris, n’en finit pas. Après bientôt 400 jours d’emprisonnement, il n’a pas pu jouir de sa libération sous caution prononcée le 19 juin pour la simple raison que cette caution, fixée à 500 000 DT (et non 190 000 comme annoncé initialement) est hors de portée du cadre qu’il était. Nabil Chettaoui et Rafaa Dkhil, tous deux anciens PDG de Tunisair et accusés dans la même affaire d’emploi fictif, ont pu rassembler leur caution et quitter la prison. La femme de Habib Ben Slama se démène actuellement pour réunir le montant nécessaire en vendant tous ses objets de valeur, sans y parvenir.




Le Tunisia Palace change de gestionnaire

La chaîne Golden Yasmin, locataire de l’hôtel Tunisia Palace à Tunis, passe la main à Hotels Invest pour cause de fin de contrat (au 30 juin 2013). Hotels Invest, que dirige Moez Boudali, est aussi gestionnaire et propriétaire de l’hôtel La Maison Blanche à Tunis.




Khaled Trabelsi est nommé DGA de l’ONTT

Khaled Trabelsi est nommé DGA de l’ONTT. Il occupait auparavant le poste de Directeur Central du Produit et de l’Investissement.




FTH : pourrissement

On croyait la FTH mûre pour une renaissance. Un nouveau départ au sein d’une Union des Métiers du Tourisme qui unifierait les intervenants du secteur et permettrait à une nouvelle génération d’hôteliers de faire entendre une nouvelle voix de la profession, jusqu’ici habituée à la cacophonie.
On croyait que l’élection d’un nouveau président serait l’occasion rêvée, pour une vieille génération d’hôteliers, de finir en beauté en concrétisant ce “rêve”, porté par le président sortant, de réaliser la Maison du Tourisme et d’unir les professionnels face aux périls qui guettent leurs entreprises et leur secteur. Une occasion de se racheter après que leur désunion a permis aux gouvernements successifs de transformer toutes leurs revendications en taxes supplémentaires, venues alourdir leurs comptes d’exploitation.
Il en a été ainsi de la demande d’amélioration de l’environnement des hôtels : elle a abouti à la création d’une taxe pour l’environnement, faute d’accord entre les hôteliers pour gérer eux-mêmes un fonds à cet effet. Il en a été de même avec la demande de renforcement du budget de promotion : il a abouti à la création du Fonds de compétitivité, alimenté par une taxe sur l’activité des hôtels et des agences de voyages, mais dont le ministre est le seul ordonnateur. Et il en est ainsi, enfin, avec cette nouvelle taxe de 2 dinars par nuitée qui se veut une réponse au vœu des professionnels de voir augmenter le budget de promotion.
La dernière élection au sein de la FTH nous montre que cette vénérable institution est incapable de changement ; que cela ne fait que trop d’années qu’elle s’est transformée en monture pour les ambitions de quelques-uns. Pour un président mal élu, la fédération récolte des démissions en nombre (y compris celles de son président sortant et de son président d’honneur) et un procès pour inéligibilité dudit président. Puisque, selon le règlement interne de la FTH, celui-ci ne pourrait être membre de la fédération puisqu’il n’assure pas « directement » l’exploitation de son hôtel.
Un humoriste le disait : l’âge mûr est, comme pour un fruit, l’étape qui précède le pourrissement. La FTH en est là.

Lotfi Mansour

Caricature-FTH




Golf en Tunisie : un potentiel négligé

Si on a pu dire que l’hôtellerie tunisienne était victime d’un développement trop rapide, le golf tunisien, lui, souffre d’une sorte de “retard de la croissance staturale” comme on en voit chez certains enfants dont la croissance est anormalement lente. En effet, depuis son lancement il y a une vingtaine d’années, le golf tunisien n’affiche pas plus de dix parcours. Insuffisant pour bâtir une politique ou fidéliser une clientèle gourmande de variété. La crise actuelle n’a fait qu’aggraver la situation en divisant l’activité par deux (passant de 215 000 green fees en 2010 à seulement 119 000 en 2011). Pourtant, la Tunisie pourrait prendre sa part d’un marché qui représente 65 millions de golfeurs, dont 7 en Europe. (voir le marché du golf en Europe)

Désigné au début des années 90 comme “produit de diversification” au même titre que la thalassothérapie, le golf tunisien n’a depuis cessé d’attendre un développement du nombre de parcours qui tarde à venir. En effet, si la thalassothérapie a pu bénéficier d’investissements privés, hissant la destination parmi les premières au monde en permettant le lancement d’une cinquantaine de centres, le golf, lui, dépend d’une politique publique d’équipement. Aussi peine-t-il à atteindre un nombre minimum de parcours pour espérer rivaliser avec des concurrents dont les équipements golfiques se comptent en centaines (Espagne : près de 350) ou en dizaines (Portugal 80, Maroc 35).

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The Residence Golf Course. Photo de une : Golf Citrus.

Durant les dix dernières années, quand nous n’avons construit que deux parcours (Tozeur et Gammarth), on en construisait 15 en Turquie, et plus de 150 en Espagne, même s’il s’agissait parfois d’alibis pour des programmes immobiliers. Avec dix parcours éparpillés sur cinq régions, la Tunisie ne pouvait prétendre attirer ni les TO spécialisés, ni les golfeurs, qui recherchent une destination régionale leur offrant une variété de terrains et lui restent volontiers fidèles.

L’effort de promotion décidé cette année par l’ONTT, avec l’allocation d’un budget de 450 000 dinars, ne peut à lui seul résoudre les problèmes structurels de ce marché : l’absence d’incitations à l’investissement et le manque de liaisons directes sur les principaux marchés, comme c’est le cas pour le marché des quatre pays scandinaves (voir entretien avec Omar Cherif, président de l’Association des managers de golf). Cet effort est sans comparaison avec celui de certains concurrents. Ainsi, l’Espagne lançait en 2009 un plan de développement du golf en 800 actions pour un budget d’investissement de 88 millions d’euros afin d’améliorer la rentabilité du secteur golf. Mais il est vrai aussi que les enjeux du secteur dans les deux pays sont eux-mêmes sans comparaison possible. En effet, alors que le golf espagnol réalise un chiffre d’affaires de 1 376 millions d’euros, soit une moyenne de 3 millions d’euros par parcours (chiffre 2009), chez nous, les revenus du golf ne dépassent guère les 15 millions d’euros, puisque le chiffre d’affaires moyen d’un parcours tunisien se situe entre un et deux millions d’euros en 2010.

En attendant, les golfs tunisiens déploient leurs efforts pour se développer et rester au top niveau (lire l’article).

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Il faut relancer les projets de golf

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Où en est votre association ?

Omar Cherif
Nous en sommes à l’élargissement du nombre des adhérents et à la création d’un statut de membre d’honneur. Ce pourront être des personnalités influentes ou actives dans le domaine, des journalistes ou des leaders d’opinion. Concernant la promotion, nous espérons faire aboutir bientôt nos projets de brochure et de film promotionnels.

Quel est l’impact de la conjoncture actuelle sur vos résultats ?

Omar Cherif
La situation n’est pas la même pour tous les parcours. Tozeur et Tabarka sont ceux qui souffrent le plus, le reste des parcours récupère lentement de la grave chute d’activité de 2011, notamment grâce au marché allemand sans lequel nous aurions peut-être mis la clef sous la porte.

Où en êtes-vous dans la relance du marché scandinave ?

Omar Cherif
Au Golf Citrus, nos réalisations oscillaient entre 48 000 et 56 000 green fees. Au moment de l’arrêt des vols Tunisair sur les pays scandinaves (vers 2006), nous avons perdu dix mille green fees ; compte tenu des habitudes des golfeurs, cela représente quelque 16 000 nuitées perdues. Et c’était encore pire au niveau de Port El Kantaoui où les Scandinaves étaient plus présents. En se retirant subitement du marché (pour laisser la place à Karthago Airlines, ndlr), Tunisair ne pouvait transmettre un plus mauvais message à ces pays. Cela consistait à leur dire : « Nous n’avons pas besoin de vous », puisque cette rupture s’est faite du jour au lendemain par un fax envoyé aux TO sous contrat avec Tunisair.
Aujourd’hui, l’activité sur ces marchés tient à la bonne volonté de quelques rares TO dont le principal est Detur. Nous nous étions réunis avec Tunisair qui avait procédé à une étude auprès des TO et conclu à une promesse de réponse et d’ouverture de ligne probable en octobre 2012. Nous attendons toujours la réponse et la ligne. En tant qu’AMGT, nous avons relancé Tunisair et obtenu une réunion au mois de février avec le Directeur Central du Produit et celui des Ventes en présence des représentants de l’ONTT. La conclusion de Tunisair était qu’une ligne sur la Scandinavie ne pourrait qu’être déficitaire, et qu’elle ne pourrait être ouverte que s’il y avait un engagement de soutien de la part de l’ONTT pour compenser les pertes éventuelles.

Nouvelair semble penser à une ouverture de ligne sur la Scandinavie…

Omar Cherif
Mes informations, recueillies auprès du pdg de la compagnie lui-même, sont que Nouvelair n’ouvre pas de ligne sur les pays scandinaves. Par contre, Syphax Airlines semble mieux disposé sur ce dossier et réfléchit, selon les dires de son directeur en France, à la possibilité d’ouverture d’une ligne.

La mauvaise conjoncture a-t-elle influé sur l’état des parcours ?
Ces derniers sont-ils bien entretenus ?

Omar Cherif
Comme vous le savez, le Flamingo a été entièrement rénové. The Residence, le Citrus et Djerba bénéficient désormais des services d’un consultant international, Sylvain Duval, qui effectue périodiquement des missions pour le maintien et l’entretien des parcours. Nous consentons donc des efforts à ce sujet et je pense que cela se reflète dans les commentaires des clients de toutes nationalités. (voir les rénovations en cours ndlr)

Que demanderiez-vous à l’administration pour un meilleur développement du secteur ?

Omar Cherif
Notre erreur majeure au début du lancement des premiers parcours est de les avoir dispersés dans plusieurs région, dont aucune n’est devenue une vraie destination de golf. De 1994 à 2008, on n’a fait que deux golfs. Il nous a donc fallu dix ans pour faire deux parcours. Rien ne peut justifier une telle lenteur. En Turquie, ce n’est pas le pays lui-même qui est la destination golfique mais la région de Belek, où ont été créés 15 parcours et 40 hôtels en quelques années. Au Maroc, ils en sont à plus de 30 parcours sans parler de l’Espagne ou du Portugal. Il faut donc faire repartir les projets de golf en priorité dans les régions où il existe déjà des parcours. Hammamet peut facilement absorber sept parcours de golf, Djerba trois, etc.
Le développement du golf chez nos concurrents est parti de la volonté des gouvernements de drainer les golfeurs et de profiter de la manne de ce marché qui représente 14 milliards de dollars de dépenses par an dans le monde. Ce sont cette volonté et cette stratégie qui nous manquent. A nous de nous fixer un objectif en nombre et en qualité de parcours et de nous donner les moyens de l’atteindre, avec ou sans un volet immobilier. J’insiste sur le rôle des pouvoirs publics car le développement des parcours pose la question des terrains, de l’adduction de l’eau et de l’environnement en général que les privés ne peuvent seuls prendre en charge.




Golf : l’offre et la demande en Europe

Selon l’étude annuelle KPMG, le nombre de golfeurs a baissé en 2011 pour la première fois depuis 20 ans, avec un recul de 41 000 joueurs parmi les golfeurs licenciés (4,389 millions au lieu de 4,436). Le Royaume-Uni et l’Irlande enregistrent la désaffection la plus notable (-42 700 golfeurs), suivis par la Suède (-21 000) et l’Espagne (-9 700). A contrario, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Finlande enregistrent de nouveaux licenciés avec respectivement 10 800, 7 600 et 4 600 golfeurs supplémentaires. On note aussi dans ces trois pays une forte présence des femmes qui représentent 35% des golfeurs en Allemagne (214 663 joueuses) et 31% aux Pays-Bas. Les pays de l’Est continuent de connaître un engouement pour ce sport, et parmi eux la République Tchèque qui enregistre une augmentation de 3 500 golfeurs licenciés. La Turquie et la Grèce s’avèrent les champions d’Europe pour l’encouragement des programmes pour les jeunes : les juniors y représentent 52% des golfeurs en Turquie et 25% en Grèce.

Camembert-Golf-E-2011

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