« Le plus beau ministre du monde… »
Le salon Fitur Madrid nous a servi d’occasion pour mieux cerner René Trabelsi, ministre atypique, avec ses atouts et ses limites.
« René ! Je peux te parler ? » était l’acclamation la plus entendue dans le pourtour du stand tunisien sur le salon Fitur à Madrid (du 23 au 27 janvier)… Chaque professionnel voulait échanger avec le Ministre du Tourisme et immortaliser le moment avec une photo.
De longs moments de discussion que le Ministre assume : « Il fallait que je passe du temps avec les commerciaux, nous a-t-il confié, puisqu’en définitive c’est eux qui permettront la réalisation de nos objectifs ».
Et pour aller au bout de son idée, il a prévu pour les prochains jours une réunion avec les commerciaux d’hôtels et d’agences de voyages à l’hôtel Le Royal à Hammamet, afin, dit-il, d’« optimiser la commercialisation ».
Handicapé par la faiblesse de ses budgets de promotion, le tourisme tunisien doit s’ingénier à trouver des idées « efficaces et pas chères », semble penser le Ministre. Et il ne manque pas de donner en exemple son passage sur C8 en prime time dans une des émissions les plus regardées en France.
Autre exemple : le voyage en avion de René Trabelsi entre Tunis, Madrid et Paris aurait dû coûter plus de 7000 Dt… Trouvant le montant excessif, le Ministre a lui-même concocté un nouveau trajet qui ramène la facture à quelque 4000 Dt.
On l’aura compris, le premier apport de René Trabelsi en tant que ministre est sa connaissance intime du secteur et des professionnels, qui lui permettent un gain de temps et d’argent appréciables.
Se démener, occuper le terrain, motiver les troupes… tant qu’il s’agit de payer de sa personne, René Trabelsi répond présent. Mais peut-il faire plus avec le budget et le (court) mandat qui sont les siens ?
Sur le marché espagnol, peut-il par exemple répondre positivement aux demandes de publicité conjointe ou à celles de partage du risque aérien émanant des TO, alors que l’ONTT peine à payer les anciens engagements de soutien pris ces dernières années ? Pour un bon déroulement de la saison, peut-il intervenir pour assurer le bon approvisionnement des hôtels en quantité et en prix pour des produits alimentaires (notamment viandes blanches) qui subissent pénuries et hausses des prix du fait de spéculateurs tunisiens ?
Peut-il réformer une administration obligée de consacrer les deux tiers de son budget au fonctionnement ? La réforme de l’ONTT en agence de promotion cessera-t-elle avec lui d’être un projet pour voir un début de concrétisation ?
La liste de telles questions peut s’allonger. Leurs réponses ne se trouvent certainement pas à l’Avenue Mohamed V, mais bel et bien à la Kasbah. L’impossible réforme de Tunisair nous renseigne s’il en est quant à l’indécision du gouvernement, ses limites budgétaires ou son manque de volonté et/ou de clairvoyance.
Alors « le plus beau ministre du monde » peut-il donner ce qu’il n’a pas ? En attendant la réponse qu’il apportera à cette question, nous n’allons pas bouder notre plaisir de voir ce professionnel devenu ministre réussir à remonter le moral des troupes, et à faire parler du pays dans de grands media.
Lotfi Mansour
Le Ministre René Trabelsi
avec Mohamed Ellouze, chaîne espagnole Vincci (6 hôtels en Tunisie)
… avec l’équipe de Tunisair (DG Moez Ben Rejeb, 2e à partir de la droite)
et l’ambassadeur de Tunisie en Espagne (M. W. Chiha, 1er à partir de la droite)
… lors de la conférence de presse donnée le 1er jour du salon
… au milieu des professionnels tunisiens