Le coup de sang d’Adel Boussarsar
Le tort d’Adel Boussarsar est-il d’avoir cru en la diversification prônée par l’Etat tunisien ? Avec l’annonce de la mise en vente de ses neuf hôtels, sa réaction est violente.
Le premier tort d’Adel Boussarsar est-il d’avoir cru en la diversification prônée par l’Etat tunisien, en s’impliquant dans deux unités à Tabarka, quatre dans le Sud et même un golf à Tozeur ? Sa deuxième erreur était-elle d’avoir cru aux promesses de soutien des gouvernements post-révolution successifs ? Seule l’intensité de sa foi dans la politique touristique du pays explique la violence de sa réaction d’aujourd’hui avec la mise en vente de ses neuf hôtels, parue ce mois-ci dans la presse.
On se souvient tous de l’appel lancé par le premier gouvernement post-révolution à l’adresse des hôteliers pour qu’ils maintiennent les emplois, contre des promesses de restructuration, de soutien, et autres mesures* dont on attend toujours de voir la couleur.
Les unités de la chaîne Golden Yasmin situées dans le Sud avaient répondu positivement à cet appel en maintenant les emplois et en procédant aux augmentations de salaires négociées par les partenaires sociaux. Pour ces unités, ces trois années se soldent par des RBE négatifs (respectivement -1,2 millions, -0,3 millions et -,057 millions de dinars) et par une augmentation vertigineuse de la masse salariale qui représentait 94% du chiffre d’affaires en 2011, 55,5% en 2012 et 58,5% en 2013. Des ratios qui mettraient à terre les plus solides des entreprises. Voilà un des paradoxes des unités Golden Yasmin du Sud tunisien** et de tous les hôtels de la région.
La mise en vente de l’ensemble des établissements de la chaîne Golden Yasmin exprime la colère d’un patron lassé d’entendre des promesses et d’attendre des mesures qui ne viennent pas. Cette colère est d’autant plus justifiée que la chaîne d’Adel Boussasar vit la même situation à Tabarka, autre région de « diversification régionale » voulue par l’Etat tunisien.
Aujourd’hui, l’ancien fonctionnaire, qui a agi en investisseur patriote, est désespéré de constater « l’absence d’une gouvernance du secteur digne de ce nom » et la pression des banques sur un secteur aux abois. Au lieu de voir le gouvernement se pencher sur un vrai plan de soutien des hôtels du Sud et de relance du secteur dans son ensemble, il craint de faire une fois de plus l’expérience des annonces sans lendemain.
Il nous reste à espérer que nos décideurs saisissent, grâce à ce geste d’abandon, la gravité de la situation et agissent en conséquence.
* les mesures demandées par les hôteliers concernent les cotisations patronales de CNDD, la baisse du taux d’intérêt bancaire pour la dette des hôtels et la réduction de la TVA.
** trois hôtels et un campement.