Tunisair : 65 ans et toutes ses dents
Il fallait donner le change. Et c’est ce qu’ont fait le PDG de Tunisair, Rabah Jerad, et son staff lors de la conférence de presse organisée vendredi 28 mars à l’Acropolium de Carthage à l’occasion des soixante-cinq ans de la compagnie. Une rencontre qui a été suivie d’un dîner offert en l’honneur de ses partenaires (TO, agences de voyages…).
Pour Rabah Jerad, le temps n’était visiblement pas au règlement de comptes avec son actionnaire principal, l’Etat, dont les décisions d’hier (voir ci-dessous) ont grevé les finances de la compagnie, et dont la non-décision actuelle d’appliquer le plan de relance préconisé depuis février 2012 continue de la pénaliser. Sans expliciter le coût de cette non-application, la compagnie avertit cependant que son déficit financier « pourrait dépasser 100 millions de dinars par an si aucune mesure n’est prise ».
En attendant, Tunisair vise une réduction de ses coûts de 30 millions de dinars par an. La compagnie se réjouit des bonnes prémisses de l’année en cours pour laquelle elle prévoit une croissance du nombre de passagers de 8,1% par rapport à 2013, avec 4 millions de passagers prévus.
Tout en annonçant le report des vols long-courriers (la liaison Tunis-Montréal, prévue pour juillet 2013, est reportée à 2015), Tunisair annonce de nouvelles dessertes pour cet été, notamment pour l’Irak (Erbil) et le Ghana (Accra) ainsi que de nouvelles fréquences sur l’Allemagne (sixième fréquence sur Francfort et troisième fréquence sur Munich).
Par ailleurs, la compagnie nationale est en discussion avec Emirates pour la mise en place de vols en codeshare sur Tunis-Dubaï. Ceux-ci pourraient débuter dès octobre 2014, permettant ainsi à Tunisair de se retirer de l’exploitation directe de cette ligne. Il ne reste plus qu’à souhaiter que le gouvernement agira cette fois-ci avec plus de diligence que ces deux dernières années.
Rabah Jerad, PDG de Tunisair, et son staff le 28 mars à l’Acropolium de Carthage.
Quand l’Etat enfonce Tunisair
Les gouvernements successifs, avant et après le 14 janvier 2011, portent la plus grande part de responsabilité dans la dégradation des finances de Tunisair. Jugez-en :
– en 2009, la Présidence de la République décide l’achat d’un A340 et son aménagement en avion VIP pour la bagatelle de 185 millions de dollars (près de 225 millions de dinars, quasiment les pertes cumulées de Tunisair des années 2011 et 2012) pris en charge entièrement par Tunisair au moyen de sept crédits bancaires. Cet avion, proposé à la vente, ne trouve pas d’acheteur mais engendre des coûts pour son entretien et son stationnement à Bordeaux en France ;
– en février 2011, Tunisair voit ses effectifs augmenter de 1000 personnes suite à l’intégration des filiales et à l’alignement des salaires sur ceux de Tunisair ;
– les taxes aéroportuaires représentent 30% des charges de la compagnie. Entre 2009 et 2013, ces taxes ont augmenté de 35% du fait qu’elles sont indexées sur l’euro, alors qu’elles sont payables en dinars – comprenne qui pourra.