Alors que le parti de Rached Ghannouchi se dit prêt à “se tunisifier”, il fait appel à un organisateur d’événements turc pour son congrès. Questions autour d’un choix.
Le 10e congrès d’Ennahda, qui débute demain, est sans aucun doute le grand événement du moment. A la question de savoir comment il a été financé, des responsables du parti ont répondu : par les congressistes qui payent 50 dinars chacun et par les adhérents. Ces derniers savent-ils qu’ils contribuent ainsi à une évasion de précieuses devises pour le pays ?
En effet, c’est un organisateur d’événements turc, le bien nommé Illusionnist (ça ne s’invente pas), qui s’est chargé de la partie “Films et animation” de ce congrès. Il a par ailleurs consulté des agences événementielles en Tunisie afin de choisir un sous-traitant pour l’intendance (estrades, projecteurs, Barco…). La logique voudrait que l’agence turque soit payée par Ennahda, pour pouvoir à son tour payer le sous-traitant tunisien.
En ce cas, la question est : comment Ennahda payera-t-elle son prestataire turc – puisqu’elle doit le payer, le financement par une partie non tunisienne étant interdit par la loi ? La Banque Centrale pourrait-elle autoriser un transfert de devises pour une prestation dont l’équivalent existe en abondance en Tunisie ? Au moment où le parti de Rached Ghannouchi se dit prêt à “se tunisifier”, il montre en tout cas sa défiance vis-à-vis des prestataires tunisiens en faisant appel à un organisateur d’événements étranger.
La logique voudrait aussi que le deuxième parti politique de Tunisie veille à préserver les devises du pays à un moment de grave crise économique. A moins qu’Illusionnist ne soit un prestidigitateur capable de faire sortir de son chapeau la “colombe” du parti islamiste, et le financement qui va avec.
Une réponse d’Ennahda nous éclairera peut-être.
Lotfi Mansour