Stratégie, objectif, Kaïs Saïed et Hannibal

Stratégie par-ci, stratégie par-là… tant d’années à se
gargariser avec ce mot qu’on a oublié qu’il ne désigne que les moyens à mettre
en œuvre pour atteindre un objectif. Et quel était cet objectif ?

Il fut un temps où la réponse était : “amélioration de
la rentabilité du secteur, doublement des recettes par touriste”. Ce qui met “la
recette par touriste” au centre des indicateurs d’évaluation de l’action des
acteurs du tourisme, et les produits à haute valeur ajoutée comme le MICE, la
thalasso ou le golf en tête de nos priorités. Au lieu de cela, on préfère
continuer à parler exclusivement des entrées et des réservations de la haute
saison, et notre stratégie se voit réduite à la taille de nos budgets,
c’est-à-dire peu de chose.

Alors on s’aligne comme un seul homme derrière un ersatz de
stratégie appelé “Tounes Wejhatouna” que finance l’Union Européenne. Lequel
programme ignore superbement les produits à haute valeur ajoutée pour nous
entrainer sur les sentiers (les “routes” ?) d’un tourisme durable qui ne
durera que le temps des financements dont il a la gestion.

Quand on suit l’actualité du tourisme et du pays, on ne peut qu’être frappé par le paradoxe qui nous fait dire non au FMI, et oui à un programme qui s’acharne à nous parer du label “durabilité” pour plaire à des clients qui ne verront sur place que l’accumulation de déchets. Un programme qui se soucie comme d’une guigne de l’ACCEPTABILITE du tourisme par le Tunisien, laquelle acceptabilité passe par un programme de développement du tourisme local, meilleur garant d’un tourisme acceptable parce que partagé par le plus grand nombre, et meilleure sécurité pour le secteur contre les soubresauts de la conjoncture (lire notre article : la myopie des décideurs).

Mais revenons à notre recette par touriste : la création du Tunisia Convention Bureau pour la promotion de la Tunisie en tant que destination MICE est une démonstration de la primauté de la volonté sur les “moyens”. Le TCB est, en effet, créé par des professionnels qui ne comptent que sur leurs moyens propres (إمكانيات ذاتية comme dirait le Président de la République). Des professionnels dont l’objectif est de remettre la Tunisie sur la carte du MICE international et qui sont en train de l’atteindre grâce à la mise en commun de leurs petits moyens.

Et ce n’est pas un hasard si le mot d’ordre du TCB s’inspire
du plus grand des stratèges, le général carthaginois Hannibal Barca : “Nous
trouverons un chemin, sinon nous en créerons un”.

Lotfi Mansour

Cet article exprime l’opinion personnelle de son auteur, letourismemagazine.com étant devenu le blog de Lotfi Mansour comme annoncé en juin 2022.