Tabarka : La Cigale se dévoile

Alors que les hôtels de Tabarka tardent à rouvrir leurs portes, la cité du corail pourra se réjouir dans quelques mois de l’ouverture d’un nouvel établissement, La Cigale Tabarka, prévue en juin. Cet hôtel de prestige n’aura rien à envier à ses homologues de Doha et Beyrouth. Selon son directeur général, Lotfi Mosbahi, les propriétaires qataris ne lésinent pas sur les moyens pour en faire une référence en Tunisie dans l’hôtellerie de luxe.

lacigale_4Lotfi Mosbahi, directeur général. La galerie d’art intégrée à l’hôtel. L’accueil du centre de thalasso.

Tant dans les lieux communs que dans les restaurants, les salles de réunion ou le spa, l’hôtel  porte les signes d’un établissement d’exception. Les produits d’accueil sont signés Hermès et la formation du personnel est confiée à des grands noms du domaine, comme Paul Bocuse pour la restauration. Le décorateur Fakher Turki signe un univers baignant dans la lumière, où la fraîcheur du blanc des luminaires et des meubles le dispute aux chaudes couleurs des différentes essences de bois, qui évoquent le monde de la forêt et de la chasse. Une galerie d’art sera intégrée à l’hôtel. Le centre de thalassothérapie fera certainement parler de lui avec ses cabines de soins reproduisant des ambiances de tous les continents (africain, indien…)
On a hâte de voir un tel établissement accueillir ses premiers hôtes.

lacigale_1Le Golf bar et le restaurant Corail.

chasse bar aout 2013
Le piano-bar.

lacigale_3Le centre de thalasso et la Cabine africaine.

meeting roomsLes salles de réunion.




Bizarre

Hier se tenait à Tunis un déjeuner-débat sur la stratégie du tourisme ; un événement louable s’il n’avait été émaillé de quelques “bizarreries”.

D’abord, il n’y a pas eu de débat comme annoncé. Les invités ont été soumis à un exercice d’école de commerce : un brainstorming, avec une durée de 20 minutes au bout de laquelle il fallait livrer le résultat de son remue-méninges. Certains hauts cadres présents se sont sentis humiliés et ont failli quitter la salle ; l’un d’eux dit y avoir renoncé « pour éviter un incident diplomatique ».

Eviter un incident diplomatique, c’était le dernier des soucis de l’ambassadeur d’un pays étranger, la France en l’occurrence, qui faisait partie des invités pour débattre de notre stratégie du tourisme – on se demande à quel titre*. Lequel ambassadeur, fort de ce passe-droit qu’on lui avait octroyé, ne s’est pas privé de critiquer la presse tunisienne qui serait, selon lui, la première responsable de la mauvaise image de la Tunisie en France. Tout cela s’est passé en présence de trois de nos ministres en exercice et d’un représentant de l’ANC, qui plus est la veille d’un 20 Mars.

Mais le pompon a été décroché par Mme Karboul qui a livré un diagnostic lumineux sur l’image de la Tunisie en Europe : « cheap, dirty and boring »  (« bas de gamme, sale et ennuyeuse »), a-t-elle eu l’outrecuidance de dire. C’est sans doute pour cela qu’elle n’a invité à cette réunion aucun représentant des hôtels de luxe, de la thalassothérapie ni du secteur MICE, trois secteurs qui nous ont permis d’exister un tant soit peu sur des segments de marché haut de gamme et de relever nos recettes.

LM

* La même question se pose pour le représentant de l’AFD et celui de la Banque Mondiale, présents à ce déjeuner ; même si l’AFD finance la mission du cabinet Deloitte chargée de conduire la mise en place de la Stratégie 2016. Le banquier qui m’octroie un prêt pour construire ma maison ne s’invite pas forcément dans ma cuisine…




Radisson Blu s’implante à Sousse

La chaîne Radisson Blu vient de conclure un contrat de gestion pour les hôtels Chams El Hana et El Hana Beach (photo) rachetés par Moez Driss. Ces deux hôtels subiront une rénovation complète pour rouvrir sous l’enseigne Radisson Blu en 2016.




Le coup de sang d’Adel Boussarsar

Le tort d’Adel Boussarsar est-il d’avoir cru en la diversification prônée par l’Etat tunisien ? Avec l’annonce de la mise en vente de ses neuf hôtels, sa réaction est violente.

 

Le premier tort d’Adel Boussarsar est-il d’avoir cru en la diversification prônée par l’Etat tunisien, en s’impliquant dans deux unités à Tabarka, quatre dans le Sud et même un golf à Tozeur ? Sa deuxième erreur était-elle d’avoir cru aux promesses de soutien des gouvernements post-révolution successifs ? Seule l’intensité de sa foi dans la politique touristique du pays explique la violence de sa réaction d’aujourd’hui avec la mise en vente de ses neuf hôtels, parue ce mois-ci dans la presse.

On se souvient tous de l’appel lancé par le premier gouvernement post-révolution à l’adresse des hôteliers pour qu’ils maintiennent les emplois, contre des promesses de restructuration, de soutien, et autres mesures* dont on attend toujours de voir la couleur.

Les unités de la chaîne Golden Yasmin situées dans le Sud avaient répondu positivement à cet appel en maintenant les emplois et en procédant aux augmentations de salaires négociées par les partenaires sociaux. Pour ces unités, ces trois années se soldent par des RBE négatifs (respectivement -1,2 millions, -0,3 millions et -,057 millions de dinars) et par une augmentation vertigineuse de la masse salariale qui représentait 94% du chiffre d’affaires en 2011, 55,5% en 2012 et 58,5% en 2013. Des ratios qui mettraient à terre les plus solides des entreprises. Voilà un des paradoxes des unités Golden Yasmin du Sud tunisien** et de tous les hôtels de la région.

La mise en vente de l’ensemble des établissements de la chaîne Golden Yasmin exprime la colère d’un patron lassé d’entendre des promesses et d’attendre des mesures qui ne viennent pas. Cette colère est d’autant plus justifiée que la chaîne d’Adel Boussasar vit la même situation à Tabarka, autre région de « diversification régionale » voulue par l’Etat tunisien.

Aujourd’hui, l’ancien fonctionnaire, qui a agi en investisseur patriote, est désespéré de constater « l’absence d’une gouvernance du secteur digne de ce nom » et la pression des banques sur un secteur aux abois. Au lieu de voir le gouvernement se pencher sur un vrai plan de soutien des hôtels du Sud et de relance du secteur dans son ensemble, il craint de faire une fois de plus l’expérience des annonces sans lendemain.

Il nous reste à espérer que nos décideurs saisissent, grâce à ce geste d’abandon, la gravité de la situation et agissent en conséquence.

 

* les mesures demandées par les hôteliers concernent les cotisations patronales de CNDD, la baisse du taux d’intérêt bancaire pour la dette des hôtels et la réduction de la TVA.
** trois hôtels et un campement.

 

 




Centenaire du voyage de Klee : la Tunisie joue petit bras

« Ce programme est un hommage que nous rendons à ce qu’a apporté la Tunisie au monde moderne ». C’est ainsi que Christiane Bohrer, du Goethe Institut, a présenté hier le programme commémorant le centenaire du voyage effectué en 1914 dans notre pays par les peintres Klee, Macke et Moilliet. Un voyage qui a marqué un tournant dans l’histoire de l’art, surtout grâce à l’œuvre du Germano-Suisse Klee, grand pionnier de l’art moderne.

Pourtant, la commémoration de l’événement un siècle plus tard risque de manquer d’éclat. La seule manifestation de grande envergure serait la venue en Tunisie d’œuvres originales des peintres – mais le projet se heurte encore à des problèmes d’autorisations. Quant à la participation de l’Etat tunisien (à travers les ministères de la Culture et du Tourisme), elle se limite à soutenir la venue d’un orchestre de 80 musiciens pour deux concerts, les 11 et 13 mars – en plus d’un voyage de presse organisé le mois dernier par l’ONTT Allemagne. La dimension internationale de Paul Klee justifierait pourtant d’organiser des événements exceptionnels sur tous nos marchés.

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Paul Klee, vor den Toren von Kairuan, 1914. August Macke, Terrasse des Landhauses in St. Germain, 1914 (Saint-Germain est aujourd’hui Ezzahra).
En haut : Paul Klee, « Mondaufgang (St Germain) », vers 1915.

 

Le rêve de Hamadi Cherif

Le projet d’exposer en Tunisie des œuvres de Klee et Macke était porté par le galliériste Hamadi Cherif, malheureusement décédé le mois dernier. Un rêve qui l’avait conduit à de nombreux voyages, ces dernières années, pour rencontrer musées et collectionneurs privés. L’exposition pourrait se tenir malgré tout au musée du Bardo ; mais il sera difficile d’obtenir les autorisations pour les aquarelles de Klee, particulièrement fragiles.

En attendant, on pourra tout de même admirer des photos de voyage en Tunisie prises par Macke et par Gabriele Münter, compagne de Kandinsky (autre grand artiste de l’époque) à la galerie Cherif Fine Art de  Sidi Bou Saïd. Et l’Espace Art Sadika présentera une série de tapis et tissages inspirés de l’œuvre de Klee, ainsi qu’un beau-livre sur le thème de Klee et le tapis tunisien.

Un voyage qui a changé le monde

« Le monde devrait remercier la Tunisie ! » Ce cri du cœur d’une journaliste allemande en Tunisie exprime bien l’idée qu’on a en Europe de ce voyage, particulièrement dans les pays germanophones. « En Allemagne, quand on dit Tunis on pense à la “Tunisreise”, le Voyage de Tunis effectué par les trois peintres. Le monde a changé depuis un siècle grâce à ce voyage, et grâce à cette lumière particulière de la Tunisie. » Aussi est-il incompréhensible que la destination ne tire pas avantage de cette référence universellement connue, « alors que cela fait plus de deux siècles que l’Italie exploite le Voyage en Italie de Goethe ! »

L’Ambassadeur de Suisse, dont le pays coorganise les manifestations de ce centenaire, l’a dit lui aussi : la Tunisie reste un pays à la beauté unique où « quiconque a une sensibilité culturelle doit se sentir inspiré ».

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Conférence de presse au palais Ennajma Ezzahra. Les différents projets présentés sont organisés par l’ambassade de Suisse, l’ambassade d’Allemagne avec ses deux agences culturelles (Goethe Institut et DAA) et l’Espace Art Sadika.

Les célébrations comptent par ailleurs des rencontres et expositions  au Printemps des Arts de Hammamet, et la pose de plaques commémoratives par la municipalité de Sidi Bou Saïd. 

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Les directeurs de Tunisair enfin innocentés

Les poursuites ont été abandonnées contre les quatre anciens directeurs de Tunisair en France dans l’affaire de l’emploi fictif.

 

Les quatre anciens directeurs de Tunisair en France, Hammadi Ghlala, Ali Miaoui, Habib Ben Slama (ci-dessus) et Abdelaziz Jbali (aujourd’hui à la retraite) ont été innocentés par la chambre d’accusation qui a abandonné les poursuites à leur encontre. Cependant trois anciens PDG restent poursuivis dans la même affaire, à savoir Tahar Haj Ali, Nabil Chetaoui et Youssef Néji.

Pour les anciens directeurs de Tunisair, c’est un non lieu pour une affaire qui n’aurait jamais dû avoir lieu. Ces cadres – tout comme d’ailleurs les PDG actuellement poursuivis – ne pouvaient en aucun cas influer sur la décision de l’ancien Président de la République de nommer sa nièce à Tunisair France. Le préjudice pour ces quatre anciens directeurs est immense, tant sur le plan moral que matériel, plus particulièrement pour Habib Ben Slama qui a croupi près d’un an en prison.




Vendôme se développe en Algérie

Après Timimoun dans le Sud algérien, Vendôme Management, dirigé par Karim Métahni, signe deux contrats de gestion avec les hôtels Liberté et Jasmin à Oran.

Le premier est un 4 étoiles de 106 chambres qui portait jusque-là l’enseigne Best Western, et le second est un apparthôtel en construction. Les deux établissements porteront l’enseigne Vendôme.




En Tunisie et nulle part ailleurs

Ceux qui ont pu voyager en Méditerranée le savent. C’est en Tunisie et nulle part ailleurs qu’on a ces plages d’un sable merveilleusement fin. C’est en Tunisie et nulle part ailleurs qu’on peut s’offrir, sans se ruiner, des vacances dans des resorts où s’expriment à la fois le dévouement d’employés souriants même quand ils sont sous-payés, et la créativité d’architectes, décorateurs et artisans qui y donnent toute la mesure de leur talent. C’est en Tunisie et nulle part ailleurs qu’on peut rencontrer, au détour d’un couloir d’hôtel, l’œuvre d’un maître comme Gorgi ou celles des plus grands peintres tunisiens d’aujourd’hui.

C’est cette Tunisie qui a damé le pion à tant de destinations balnéaires depuis quarante ans. Et c’est cette Tunisie que tant de destinations ont imitée pour mieux la dépasser : dans son sillage, tour à tour la Turquie, le Maroc et l’Egypte se sont mis au balnéaire.

Aujourd’hui, il est malheureux de constater que c’est en Tunisie et nulle part ailleurs qu’un ministre du Tourisme dénigre ceux-là même qu’il est censé défendre. Au moment où bon nombre de nos hôtels sont à l’agonie, Mme Karboul a cru bon de déclarer hier à Tourmag (magazine professionnel lu par des agents de voyages français déjà hésitants à vendre la Tunisie) : « Nos visiteurs viennent en vacances au bord de la mer dans des hôtels qui pourraient être partout ailleurs dans le monde ».

Mais par quoi Mme la Ministre va-t-elle remplacer ce foutu balnéaire et ses hôtels sans âme? Par le tourisme saharien ? Par le tourisme de santé ? Par le MICE ? Que nenni. Sa réponse est sidérante : « créer des circuits, ouvrir des maisons d’hôtes, développer l’éco-tourisme ». Il manque juste l’agri-tourisme et les campings.

Savez-vous, Mme la Ministre, combien de clients accueillent ou accueilleront les maisons d’hôtes ? combien d’employés elles occupent ou occuperont ? combien de devises elles rapportent ou rapporteront ?

A-t-on besoin d’expliquer à une consultante comme vous, Mme la Ministre, qui plus est passée par le Boston Consulting Group, que les « Vaches à lait »* comme le balnéaire permettent à elles seules de financer les « Dilemmes »* qui ne seront peut-être que des « Poids morts »* ? Savez-vous que ce sont ces « Vaches à lait », par ces temps de vaches maigres, qui nous permettent encore de faire bouillir nos marmites ?

Dénigrer la quasi totalité du parc hôtelier tunisien, rabaisser le produit phare de notre tourisme pour vanter un produit de niche qui est encore en gestation, c’est lâcher la proie pour l’ombre.

Si ces déclarations expriment réellement la pensée de notre Ministre, il y a de quoi désespérer du tourisme et des ministres du Tourisme.

Lotfi Mansour

 *  Voir « Matrice BCG » et « SBU » (Strategic Business Unit)




Mark Watkins (Coach Omnium) : les OTA sont nécessaires, mais pas suffisants

Les OTA sont une chance pour les hôtels indépendants, estime le consultant français Mark Watkins, président de Coach Omnium. – Entretien.

 

Il y a quelques mois, Mark Watkins, président de Coach Omnium*, surprenait les professionnels français en soutenant tout l’intérêt d’une collaboration des hôtels indépendants avec les OTA (Online Travel Agencies). Il nous explique ici pourquoi. Par ailleurs président du Comité pour la modernisation de l’hôtellerie et du tourisme français, il évoque aussi les fédérations professionnelles qui, « par leur incompétence et leur inefficacité, donnent une mauvaise image de la profession au public, aux journalistes et aux politiques ». Un discours qui ne manque pas de pertinence pour le contexte tunisien.

* Coach Omnium : Société de conseil & d’études marketing et économiques pour le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, les spas et les casinos.


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Vous soutenez que les OTA sont « une chance » pour les hôtels indépendants dans leur effort d’exister à côté des chaînes intégrées. Cette « chance » ne perd-elle pas de son intérêt au vu du coût qu’elle engendre pour ces hôtels ?

Mark Watkins
Oui, cette analyse a beaucoup surpris les professionnels et certains ont eu un coup de chaud en l’entendant ou la lisant. Le constat pour arriver à cette conclusion est le suivant : un hôtelier indépendant français sur cinq – seulement – développe une commercialisation active pour son hôtel. Les quatre autres n’en fournissent aucune, ou encore ont ce que nous appelons une commercialisation passive. Ils attendent le client comme s’ils étaient assis sur un tabouret devant leur porte, avec un vague site Internet sans possibilité de réserver en ligne, sans visibilité, sans attractivité. Ils font encore moins d’efforts quand il s’agit de prospecter vers les agences, entreprises et autres cibles de clientèle dont ils ont pourtant besoin.

Il y a globalement trois raisons pour lesquelles les hôteliers ne commercialisent pas ou peu leur établissement : manque de temps, manque de savoir-faire et manque de moyens. Les OTA peuvent, dans ce cas, être pour eux d’une grande aide en prenant en compte le fait que 93 % des clients d’hôtels européens et nord-américains recherchent les hôtels où séjourner via le Net.
Certes, il y a une commission à payer. Mais toute commercialisation, promotion ou communication coûte fatalement de l’argent. Ces hôteliers n’en dépensent pratiquement pas ailleurs. De plus, on ne paie les OTA que lorsqu’un client est là. On n’avance pas les fonds, ce qui serait le cas en employant, par exemple, un commercial ou en faisant de la publicité.

Pour autant, quand certains hôtels ont de 40 % et jusqu’à 60 % de leurs chambres vendues par les OTA, c’est trop. Il leur faudrait idéalement parvenir à limiter ce volume à 20-25 %. Ce qui signifie qu’il faut quand même passer par la case commercialisation à travers d’autres canaux. Déjà, mettre en place un site performant serait faire un grand pas en avant pour capter des clients, par ailleurs très informés.

Pensez-vous que vos conclusions restent valables dans le cas des destinations où l’hôtellerie est fortement dépendante des tour-operators, comme c’est le cas en Tunisie ou en Espagne ?

Pour les destinations “loisirs” et vacances, travailler avec les tour-opérateurs “classiques” est évidemment une nécessité. D’autant plus quand les touristes doivent s’y rendre majoritairement en avion. Mais nous avons trouvé également des vertus aux OTA comparés aux tour-opérateurs. Les OTA ne sont pas nécessairement plus chers (cela dépend bien entendu du type de contrat que l’on signe avec elles, mais plus c’est cher et plus on est valorisé par elles sur le Web). Mais surtout, cela améliore la trésorerie par une baisse des délais de paiement puisqu’on est crédité quand le client vient, tandis que les tour-opérateurs règlent généralement à 45 ou 60 jours.

N’en déduisez pas que je soutiens les OTA. Je les regarde froidement et simplement comme un outil de vente, avec ses avantages (nombreux car ils sont extrêmement performants commercialement) et ses inconvénients (contrats léonins, coûts, hégémonie…).

En tant que président du Comité pour la modernisation de l’hôtellerie et du Tourisme français, vous êtes très critique vis-à-vis des syndicats professionnels qui manqueraient de compétence et de légitimité, ainsi que vis-à-vis d’Atout France qui manquerait de neutralité. Y a-t-il un réel problème de gouvernance du tourisme en France, ou faut-il y voir seulement une expression du fameux « caractère râleur » des Français ?

Evidemment, comparée à la situation actuelle du tourisme en Tunisie, la France est gâtée sur ce point. Nous avons donc des problèmes de “riches” à régler ! (sourire). Je ne peux pas ici, par manque de place, vous expliquer toute la problématique du tourisme réceptif français.

Du côté des syndicats hôteliers, nous en avons cinq en France qui ne s’entendent pas, qui sont en rivalité, qui ne sont pas d’accord entre eux (ou si peu), qui négocient avec les pouvoirs publics en ordre dispersé et qui ne travaillent pas leurs dossiers avec professionnalisme. De plus, ils s’entourent mal quand il s’agit de traiter avec les ministères, n’ayant pas à leurs côtés des énarques capables de discuter avec d’autres énarques. Enfin, ils traitent de sujets d’arrière-garde, sont corporatistes et ont du mal à penser aux consommateurs. Par leur incompétence hélas avérée et leur inefficacité, ils donnent une mauvaise image de la profession au public, aux journalistes et aux politiques.
Rien qu’en hôtellerie, les 17 000 hôtels français reçoivent annuellement près de 27 millions de clients, dont un tiers d’étrangers. Nos syndicats ne pensent pas à eux, mais seulement à leur propre intérêt, au détriment aussi de celui de la profession qu’ils sont censés représenter.

Je suis conscient d’être sévère (mais pas gratuitement râleur). Je tiens compte, dans mes reproches, de ce que ce laxisme dure depuis trop longtemps tandis que le monde auquel il faut s’adapter bouge très vite. Je tiens compte surtout du fait que près de vingt hôtels et restaurants indépendants ferment chaque jour en France…
L’exemple que j’aime citer est celui du syndicat de l’hôtellerie de plein air (campings), qui a tout compris depuis près de quinze ans. Il soutient intelligemment ses professionnels mais agit aussi pour développer la qualité fournie à la clientèle ; cette organisation professionnelle a une préoccupation consumériste. Le résultat se voit : les campings ont gagné fortement en nuitées et en satisfaction de leurs clients. Et cela permet à de nombreux entrepreneurs de ce secteur de bien gagner leur vie et de réinvestir constamment.

Pour ce qui concerne Atout France, la grosse partie de son budget part en frais de fonctionnement. Son travail de représentation touristique et de promotion est négligeable et négligé. Il demande toujours davantage de moyens financiers, mais nous aimerions plutôt que soit mesurée la qualité de ses interventions avec son budget actuel, avant d’estimer s’il a besoin ou pas d’une rallonge budgétaire. Disposer de plus d’argent ne signifie pas nécessairement être plus agissant.
Nous reprochons à Atout France d’être surtout au service des pouvoirs politiques en place et des grandes entreprises de tourisme, tandis que près de 95 % du secteur se compose de petites et de micro entreprises. Personne ne les aide, personne de pense à elles. Atout France encore moins que d’autres.

Plus largement, la France n’a pas de stratégie pour son tourisme, sinon simulée dans les discours. Ailleurs, je ne sais pas, mais dans notre pays, tout le monde croit, quand un discours est prononcé, que tout a été fait. Ce qui n’est bien sûr pas le cas. Tout reste à faire et souvent ne l’est pas.
Enfin, nous ne voulons plus que l’on se gargarise avec « La France, première destination mondiale de tourisme », quand on sait – sans que cela soit dit, évidemment – qu’elle n’est qu’au 83e rang mondial des dépenses moyennes par touriste international !
Cette affirmation, que nos ministres du tourisme se passent de main en main et communiquent avec mauvaise fierté, pose le problème des lauriers sur lesquels on s’endort. On n’investit pas assez, on ne forme pas correctement, on ne valorise pas les métiers, on ne fait pas suffisamment de promotion, etc. Pourquoi le ferait-on puisque, de toute façon, le tourisme français ne serait pas affecté par la crise économique – puisqu’on dit que les chiffres sont bons, n’est-ce pas ?

Il est préoccupant, chez nous, que les cercles politiques et les élus n’aient pas un intérêt pour le tourisme et ignorent fréquemment son fonctionnement, ses enjeux et ses mécanismes. Alors que c’est une industrie complexe qui demande de plus en plus de connaissances de pointe. Le message officiel de la « France, première destination mondiale » berce nos élus et nos gouvernants.
Pourtant, le tourisme représente près de 7 % du PIB et presque 1 million d’emplois directs et indirects. Mais tout reste à organiser, ce qui ne peut se faire tant que nous aurons un millefeuille d’entités publiques et parapubliques qui ne feront que défendre leur petit pré carré local, et tant que notre ministère du Tourisme sera au dernier rang du protocole gouvernemental.

 Propos recueillis par Lotfi Mansour




Trois vérités sur M. Toumi

Hier, sur le plateau de Nessma TV, le président de la FTAV Mohamed Ali Toumi nous a paru comme un amnésique qui a tout oublié, sauf sa haine envers un ancien ministre. Nous jugeons qu’il est temps de lui rappeler trois petites vérités.

– Cet honorable agent de voyages, candidat malheureux au poste de Ministre du Tourisme, est l’auteur du plus grand fiasco en communication de l’année 2013 avec son événement pompeusement dénommé “Barsha”. Mal préparé par M. Toumi, cet événement s’est révélé un échec et un gouffre financier, dont l’ONTT a dû passer au peigne fin les factures présentées pour remboursement – et ne supportera finalement qu’une partie des frais, le reste étant à la charge de la FTAV. Cette attitude du Ministère et de l’ONTT a marqué le début du désamour entre M. Toumi et le Ministre du Tourisme sortant, et peut-être même de tous les cadres de l’ONTT.

– Sur le plateau de Nessma, Mohamed Ali Toumi revendiquait le droit de participer à toutes les étapes des études que mène le Ministère et se gaussait de la non application de l’étude “Stratégie 2016” pour le tourisme. Une demande qui serait légitime si le même Toumi n’avait pas mis dans les placards de la FTAV l’étude “L’Agent de voyages de demain, perspectives de développement et plan d’action”. Cette étude, financée en grande partie par l’Administration, a préconisé une stratégie en cinq axes et un plan d’action en dix points dont l’exécution par la FTAV devait s’étaler d’avril 2012 à octobre 2013. De cette étude, rien n’a été réalisé à ce jour. Des dizaines de milliers de dinars jetés par la fenêtre, sur lesquels M. Toumi n’entend rendre de comptes à personne.

– Enfin, monsieur Toumi demande à l’Etat d’imposer aux hôteliers la signature en euros pour les contrats avec les TO. Oubliant que beaucoup d’hôtels le font déjà, il oublie aussi de se concerter avec son collègue de la FTH (bizarrement absent du plateau) sur ce sujet ; il oublie surtout de nous dire qu’il ne sait pas de quoi il parle, puisqu’il n’est le réceptif d’aucun TO.

A suivre…

Lotfi Mansour